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Être fils de la veuve pour voir l’étoile flamboyante

24 Janvier 2018 , Rédigé par elle est parce qu'ailée Publié dans #planches maçonniques, #Franc-maçonnerie

Qu’est-ce qu’une veuve sinon une épouse qui a perdu son conjoint ? En d’autres termes, et d’une manière plus globale, c’est un couple qui a perdu sa partie masculine. En effet, le mot  « veuve » vient du latin « vidua » qui signifie privé de… son complément.

Dire que le franc-maçon est fils de la veuve serait-il dire qu’il est enfant d’un vide à opérer ?

Dans le registre alchimique, le couple initial existe. La matière première des alchimistes est un corps double fait de l’union du  mercure femelle et du soufre mâle, rencontrés dans le cabinet de réflexion. Le premier corps est une humidité de l'air, mêlée avec un air chaud, en forme d'une eau grasse, adhérente à chaque chose, pour pure ou impure qu'elle soit. Comment les philosophes ont-ils nommé cette humidité ? Mercure. Par qui est-il gouverné ? Par les rayons du Soleil & de la Lune. Le second corps c'est la chaleur de la terre, c'est à dire, une chaleur sèche que les Philosophes appellent soufre.

Ce minerai à double complexion perd  son soufre  pour devenir «mercure », « mère –cure » qui donnera la semence. Pour cela il faut dégager la matière de toutes ses impuretés : car il n'y a point de métal, si pur qu'il soit, qu'il n'ait ses impuretés, l'un toutefois plus ou moins que l'autre. Le mercure  veuf  de son  soufre parvient à maturité à force d’itérations de purification, les résultats de cette multiplication permettent la transmutation.

Les enfants de la veuve ne seraient autres que des êtres transmutés, manifestation directe de la puissance de la veuve. C’est donc autour du vide que je voudrais vous montrer comment le travail sur la pierre est une façon d’être un enfant de la veuve.

 

La pierre brute est un protolithe : Comment appelez-vous ce corps-là ? - Pierre brute, ou chaos, ou illiaste, ou hylé. - Est-ce la même pierre brute dont le symbole caractérise nos premiers grades ? -   Oui, c’est la même que les Maçons travaillent à dégrossir, et dont ils cherchent à ôter les superfluidités ; cette pierre brute est, pour ainsi dire, une portion de ce premier chaos, ou masse confuse, écrit Osward Wirth dans Le symbolisme hermétique, reprenant le Catéchisme de l’étoile flamboyante du baron de Tchoudy. Dégrossir la pierre brute, c’est augmenter le vide autour d’elle. Le vide est la limite de la forme qui permet de la voir. Le vide qui est fait à ce stade est appelé le vieil homme, l’être naturel, l’état de l’homme avec ses agissements psycho-matériels, son état conditionné, ses liens ethniques et sociaux, son milieu politique ou religieux, bref, ses limites. L’homme ordinaire est certes intéressant; mais combien plus intéressant celui qui tend à dépasser la condition humaine ordinaire! Il ne doit d’ailleurs pas y avoir de réelle séparation : le quotidien et l’exceptionnel s’apprécient l’un par rapport à l’autre. Pour les rites maçonniques qui pratiquent le « ni nu, ni vêtu »,  le dénudement du récipiendaire est conforme à de très nombreuses traditions initiatiques qui commencent par un renoncement. On dit qu’il faut abandonner le vieil homme. Lors de la première initiation du candidat au grade d'apprenti, quand on le dépouille de tous métaux & minéraux, & que d'une façon décente on lui ôte une partie de ses vêtements, ce qui est analogue aux superfluités, surfaces ou scories, dont il faut dépouiller la matière pour trouver la semence.

Ce dépouillement, cet abandon progressif est un renoncement de ce qu’il faut quitter pour laisser plus de place à ce qui compensera la perte de tout le reste.

Une prise de conscience de sa fin véritable et une conversion de son énergie ouvrent vers l’homme « évolué », vers  l’être éveillé à la science véridique de la métamorphose, de la transmutation, allié aux forces supérieures pour parcourir inlassablement la voie héroïque et gnostique vers le Soi.

 

A - La pierre cubique est la forme donnée par ce premier vide. C'est l'hexaèdre régulier, le Chef-d'œuvre que doit réaliser l’apprenti.

La pierre cubique est à la fois une forme de la pierre taillée et une figure géométrique, le cube, qui permet des spéculations numérologiques et des commentaires analogiques à caractère moral ; la pierre cubique symbolisant les progrès que doivent faire les francs-maçons pour devenir compagnons. Solide le plus parfait, il est la pierre angulaire du Temple immatériel élevé à la Philosophie et l'emblème de l'âme aspirant à monter à sa source.

Au RÉR les quatre angles supérieurs de la pierre cubique représentent l'universalité de l'Ordre, et les quatre parties du monde dans lesquelles il est répandu, les quatre angles inférieurs, les quatre vertus qui sont la base de l'Ordre.

Le franc-maçon utilise le levier pour soulever la pierre et voir sa face cachée. Devenu pierre cubique, le compagnon s’offre à toutes les expositions intellectuelles et spirituelles, chacune de ses faces pouvant représenter les 6 orientations de l’univers, Orient, Occident, Septentrion, Midi, Zénith et Nadir. La pierre cubique est une forme d’être pour s’assembler aux autres pierres que sont, non seulement, les francs-maçons mais tous les hommes et toutes les femmes. Chaque face, chaque angle, chaque arête est identique aux autres à l'image des hommes en fraternité.

A ce stade,  le compagnon doit accomplir un autre travail avec le vide pour trouver une nouvelle forme, la pierre cubique à pointe.

 

B - La pierre cubique à pointe ne se rencontre qu’au Rite Écossais Ancien et Accepté et au Rite Français. La plupart des autres Rites, les Rites anglo-saxons entre autres, l’ignorent totalement.

Les tableaux de Loge du XVIIIe siècle représentent clairement que tout itinéraire initiatique correspond à la transformation de la pierre brute en pierre cubique à pointe. Cette image de l’ascension vers la Transcendance correspond aussi à la recherche de la pierre philosophale ; nous allons essayer de la trouver.

Le sommet de la pierre cubique à pointe est assimilable à un omphalos, une représentation visible et concrète du centre du monde, d’une ouverture sur le divin, quintessence de l’être, point de rencontre du manifesté et du non-manifesté comme un axis mundi[1]. Pour René Guénon, à ce point de vue, la transformation de la « pierre brute » en «pierre cubique» représente l’élaboration que doit subir l’individualité ordinaire pour devenir apte à servir de « support » ou de « base » à la réalisation initiatique ; la « pierre cubique à pointe » représente l’adjonction effective à cette individualité d’un principe d’ordre supra-individuel, constituant la réalisation initiatique elle-même. L’extraction de la part matérielle de l’être laisse place au contact avec le monde de l'Esprit.

à l’intérieur de son volume, la pierre cubique contient le pyramidion qui lui permet de devenir pierre cubique à pointe. Le pyramidion, extrait de l’intérieur de la pierre cubique, a un volume égal à celui prélevé ; le vide intérieur, ainsi opéré devient le plein quand ce qui est en bas est comme ce qui est en haut. L’extraction de la part matérielle laisse place au contact avec le monde de l'Esprit.

La pointe inversée, à l’intérieur, du pyramidion, indique le centre de la pierre. Ce point est celui-là vers où convergent d'une part les six perpendiculaires au centre de chacune des faces et les quatre droites reliant les huit pointes opposées et perpendiculaires deux à deux. Un des secret des constructeurs serait de rectifier la Pierre pour essayer d’en faire un «diamant», jusqu’à en trouver ce Centre. Ce Centre qui, sous une autre formulation et par simple antimétabole du langage codé des alchimistes, est ce que la symbolique appelle « la Pierre Cachée », indiquerait qu’en réalité la quête du VITRIOL consiste à rechercher « ce qui est caché dans la pierre ».  

 

On peut voir, sur de nombreux tapis de loge de compagnon, qu’au sommet de la pyramide quadrangulaire est plantée une hache ; image pour le moins surprenante et laissant supposer un message hermétique à décrypter.

. Selon l’opinion de Jules Boucher, la Pierre est placée sub ascia, sous la hache, pour indiquer son caractère sacré. Justifiant que cette pierre soit un des bijoux immobiles, Jules Boucher nous en explique sa valeur propédeutique : la Pierre placée sous la hache pour indiquer son caractère sacré, reste « cubique » bien que surmontée d’une pyramide qui la protège de l’Eau, comme la hache la protège du Feu (de la foudre). Cette Pierre représente l’idéal maçonnique qu’il faut sans cesse défendre contre l’Eau et le Feu ; la première représentant les forces dissolvantes, le second les forces par trop sublimisantes. Le Maçon doit se tenir dans un juste milieu  avec sûreté et rectitude.

. Pour l’alchimiste, le sens de ce symbole est le même que celui de l’épée, du poignard ou du marteau. Ces armes blanches désignant les larmes blanches du sel blanc (petites gouttes) qui hache la matière. La lettre H représente l’Esprit (voir Les Demeures Philosophales de Fulcaneli). Cette hache ou H ou encore ce sel se manifeste sous quatre états différents correspondant aux quatre triangles de feu constituant la pyramide. À l’état cristallisé il est Terre, liquéfié il est Eau, vaporeux il est Air et excité il est Feu. L’alchimiste travaille sa pierre brute ou matière première qui deviendra pierre des philosophes laquelle se transformera en pierre philosophale. La Pierre cubique est travaillée par la hache et par les quatre éléments associés à l’Esprit. La pierre cubique à pointe devient, selon cette interprétation, l’indication pour le compagnon d’entrer, une fois encore, dans la voie de l’alchimie.

Que peut découvrir le compagnon s’il n’oublie pas qu’il est fils de la veuve ? Il doit séparer, enlever quelque chose, faire encore du vide pour donner forme. Alors, entrons dans le vide du sujet, notre pierre.

Ouvrons  avec la hache, la pierre cubique contenant son pyramidion ; elle n’est pas creuse, évidemment c’est de la pierre !  Superbe ! Chacune des 6 faces s’inscrit dans un pentagone auquel manquerait un cinquième tétraèdre.

Ce vide permet justement, au pyramidion de se dissimuler dans la pierre cubique. L’étoile flamboyante apparaît dans les interstices des tétraèdres retournés.

Ce sont les vides successifs,  l’invisible questionné, qui ont montré que l’étoile flamboyante est en gestation dans  la pierre brute. En son cœur se trouve la pierre philosophale.

L’alchimiste Patrick Burensteisnas le montre magistralement dans ses films le voyage alchimique. De même, l'être reconstruit de l'intérieur par les vertus transmutantes de son propre cœur, réceptacle de la pierre, est devenu alors incorruptible.

Le cherchant, en devenant enfant de la veuve, c’est-à-dire en passant par la pierre taillée et évidée, est parvenu jusqu’à devenir adepte franc-maçon lorsqu’à la question, « êtes-vous compagnon ? », il peut répondre : j’ai vu l’étoile flamboyante.

 

 

[1] lieu où communiquent les trois niveaux cosmiques : ciel (le monde divin), terre (le monde des hommes), et monde inférieur (le monde des morts).

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É
Bonjour,<br /> Éclaircissons, en toute humilité, les explications subtiles Alchimiques. <br /> En remontant aux premières Écritures, nous trouvons les lettres cunéiformes.<br /> Le triangle la pointe en bas « ∇ » y représente le sexe féminin, c'est le pubis, et la pointe en haut « ∆ » le sexe masculin. Puis on les réunit, et cela devient un signe plus compliqué.<br /> Les deux natures masculine et féminine sont représentées unies dans un signe « N » formé de deux branches unies par un trait qui va de haut en bas, de l'esprit au sexe. Chez les hébreux, il s'agit de la lettre Aleph. C'est cette même lettre qui deviendra « l'H » quand la ligne qui unit les deux branches sera mise horizontalement (dans le régime de l'égalité des sexes).<br /> Dans l'alphabet européen, nous la retrouvons dans le « A » majuscule formé de deux branches reliées par un trait.<br /> Dans l'alphabet samaritain, le daleth (D) représente le vagin.<br /> Les premiers signes idéographiques « I » et « O » sont restés longtemps dans les usages pour désigner les sexes.<br /> On les retrouve dans les glyphes du tarot. Le masculin est représenté par « I » (une épée qui pénètre) et, comme conséquence physiologique, la force symbolisée par une massue (la massue d'Hercule), qui devient un bâton dans les cartes modernes.<br /> Le sexe féminin est symbolisé par une coupe et, comme conséquence, l'or.<br /> Il s'agit du primitif jeu de cartes égyptien, encore en usage en Espagne.<br /> https://livresdefemmeslivresdeverites.blogspot.fr/<br /> Cordialement.
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E
Merci Étirév Anwen pour ce très intéressant complément<br /> La lettre aleph montre deux yod séparés par un vav comme par une diagonale ; un yod au-dessus est séparé de celui du dessous. Le vav est l’une des lettres du Tetragramme (יהוה yod-hé-vav-hé) et, comme telle, elle les lie en les séparant. Tel est le message d’Aquiba, «ne prenez pas l’eau (d’en-haut) pour de l’eau (d’en bas) car elles sont en réalité réunie par le nom ineffable». <br /> En Mésopotamie, le mot qui désignait la vulve féminine représentée en écriture cunéiforme ougarit par un triangle pointe en haut, se prononçait oyin comme le mot qui nommait l’œil en hébreu; ce qui a d’ailleurs donné par évolution dans les diverses civilisations le ayin hébreu et le « O » de notre alphabet. <br /> La langue hébraïque permet de relier substantiellement masculin et féminin en utilisant les termes ish (איש) et ishshah (אישה). En chacun de ces termes se trouve soit la marque de la virilité (le yod fécondateur) soit celle de la féminité (le hé). En guématrie, ish, Aleph, 1 + Iod, 10 + Shin, 300 donne 311 et par réduction cinq (5), qui est le nombre de l’alliance du masculin et du féminin ! D'après l'exégèse biblique, le signe Hé, ה est l'instrument de la création et de la vie : une lettre Hé de petites dimensions apparaît dans le mot «béhébaram», (Genèse 2, 4), mot qui veut dire que Dieu créa les vivants avec le Hé. De même, après avoir scellé l'alliance qui le lie au divin par la chair, le patriarche Abram reçoit un signe Hé (valeur 5) dans son nom devenant Abraham en provenance du partage en deux du iod (valeur 10) pris dans le nom de Saraï son épouse qui devient Sarah. <br /> Pour la pensée initiatique, les genres ne sont pas réductibles au sexe ou, plutôt, le sexe n'est qu'une manifestation, une expression, parmi d'autres genres. Ainsi homme et femme ne se réduisent pas à leur sexe : la femme n'est pas un mâle de sexe différent et vice versa. Si les genres ne sont pas réductibles au sexe, le féminin, donc, peut être une qualité partagée par le mâle. Il n'y a pas d'assignation «biologique» ou essentialiste des genres aux sexes. L'éclairage ésotérique met en évidence le concept de bisexualité. La bisexualité simultanée caractérise des êtres qui sont des archétypes, des êtres primordiaux. L'humanité apparaît au terme d'une série de séparations, de divisions, de classements, comme dans une décantation des créatures: séparation entre le Créateur et la créature, le ciel et la terre, le règne végétal et animal, l’homme et la femme ; la différenciation des sexes, c'est cette séparation de l'unité primordiale.<br /> En fait l'opinion commune associe, en les confondant, le fait d'être homme ou femme et les notions de masculin et de féminin. Si l'on en croit Pierre Bourdieu, les séries d'oppositions que ces notions entraînent dans leur sillage sont universelles et les correspondances admises reprennent et corroborent la domination masculine. Ainsi on retrouvera du côté masculin actif et du côté féminin passif, et les opposés dominant/dominé, dur/tendre, puissant/faible, devant/derrière, supérieur/inférieur, haut/bas.» Cependant la pensée ésotérique va nuancer ces couples d'oppositions et l'on trouvera des appréciations qui fonctionnent plutôt comme des articulations fondamentales de la pensée avec, au masculin, miséricorde et en opposé au féminin jugement, quiétude/ activité, épanchement/ réceptivité, intériorité/ extériorité, cause/ effet, déploiement/ limitation, forme/ matière, richesse/ pauvreté, lumière/ obscurité, droite/ gauche. D'autres paires d'opposés dans la pensée grecque, comme celles qu'Aristote attribue à un philosophe pythagoricien, mettent en parallèle certaines ressemblances avec cette liste. On trouve ainsi limité/ illimité, impair/ pair, un/ multiple, droite/ gauche, mâle/ femelle, repos/ mouvement, rectiligne/ courbe, lumière/ obscurité, bon/ mauvais, carré/ oblong.<br /> C'est dire et redire que nous sommes mâle et femelle, à la fois, comme image de la création. C'est une consubstantialité de l'unité regardée dans ses aspects différenciés mais c'est de l'unité dont il est toujours question. RAPMM : L'Être Suprême est Un, et de Lui émane le pouvoir créateur, ou Perusha, le Principe divin mâle, et quand le Un devient Deux, mâle et femelle, de cette union du principe d'intelligence avec la première matière se développe un troisième, qui est Viradj, le monde phénoménal.<br /> En 1929, la Grande Loge Unie d'Angleterre édicta ses principes de base qui sont toujours en application parmi lesquels apparaît très nettement la séparation homme/femme : «que les membres de la Grande Loge et des Loges individuelles soient exclusivement des hommes, et qu'aucune Grande Loge ne doit avoir quelque relation maçonnique que ce soit avec des Loges mixtes ou des obédiences qui acceptent des femmes parmi leurs membres.»<br /> Extrait de mon "Dictionnaire vagabond de la pensée maçonnique", éd. Dervy<br /> Très cordialement