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À l’intérieur de trois

24 Novembre 2017 , Rédigé par elle est parce qu'ailée Publié dans #planches maçonniques

À l’intérieur de trois

 

Ce fut ma première planche d'apprenti à laquelle j'ai juste ajouté quelques notes

sur les bijoux  et in fine sur le dualisme et la dualité

Deux aristocrates hongrois avaient décidé de jouer à un jeu où le gagnant serait celui qui prononcerait le nombre le plus élevé. Bien dit l’un d’eux, c’est à vous de commencer. Après quelques instants d’intense réflexion il annonça : trois. C’est vous qui avez gagné reconnut l’autre en abandonnant.

Si les deux hommes avaient été des hottentoth, aux dire des explorateurs, l’histoire eût pu être la même. En effet, plusieurs tribus hottentoth, n’ont, dans leur vocabulaire, de nom pour désigner les nombres supérieurs à trois. Au-delà ils utilisent l’adverbe « beaucoup ».

La nature indique qu’il n’y a que trois dimensions dans le corps, écrit Claude-Louis de St martin, qu’il y a trois divisions possibles dans tout être étendu, qu’il n’y a que trois figures dans la géométrie, qu’il n’y a que trois facultés innées dans quelque être que ce soit, qu’il n’y a que trois mondes temporels ou trois grades dans la vraie franc-maçonnerie ; en un mot que sous quelque face que l’on envisage les choses créées, il est impossible d’y trouver rien au-dessus de trois.

Trois est un nombre fondamental. Il exprime un ordre intellectuel et spirituel en Dieu, dans le cosmos et a fortiori dans l’homme.

Tout procède nécessairement par trois qui n’en font qu’1. En tout acte se distingue ; 1- le principe agissant comme sujet de l’action, 2- l’action de ce sujet, son verbe, 3- l’objet de cette action, son résultat.

D’une manière générale, le premier principe est actif par excellence, le deuxième est intermédiaire, passif par rapport à lui mais actif par rapport au suivant, quant au troisième il est strictement passif. En réalité, tout phénomène, sur quelque échelle, dans  quelque monde, est le résultat de la combinaison ou de la rencontre de forces différentes. C’est la loi des trois forces. La pensée contemporaine reconnaît l’existence de deux forces et leur nécessité pour la production d’un phénomène (force et résistance, magnétisme positif et négatif, cellule mâle et femelle). Quant à la troisième force, elle est souvent ignorée et pourtant nécessaire car c’est uniquement avec son aide que les deux premières peuvent produire leur résultat, la première active, la deuxième passive et la troisième… neutralisante. Elles n’apparaissent comme telles qu’au seul moment où elles rentrent en relation les unes avec les autres.

René Guénon présente dans son livre La Grande Triade les divers types de rapports que peuvent entretenir les termes d'un ternaire. Trois fondamentaux se rencontrent dans la tradition : un principe se polarisant en deux complémentaires (comme c'est le cas pour l'unité dont dérivent le principe masculin, le ciel, et le principe féminin, la terre), un ternaire composé de ces deux complémentaires et de la résultante de leur union (comme c'est le cas pour le ciel, la terre et l'Homme, fils de la terre et du ciel), un ternaire linéaire où un terme engendre le deuxième qui engendre le troisième (comme c'est le cas pour les «trois mondes», la manifestation informelle, la manifestation subtile et la manifestation corporelle). Le ternaire, incluant la terre, le ciel et l'homme, place ce dernier en position de médiateur entre les deux premiers ; autrement dit entre équerre et compassignalé comme étant le lieu où se trouve le maître signalé comme étant le lieu où se trouve le maître  comme étant aussi le lieu où se trouve le maître en Franc-maçonnerie.

 

On retrouve dans diverses écoles, sous diverses formes, cet aspect plus intelligible de l’unité qui est un ternaire.

  • Dans le christianisme, avec l’avènement du Fils proclamé, au concile de Nicée (325), de même nature que le Père, consubstantiel, coéternel, engendré et non créé, l’Unique des Hébreux a éclaté en se divisant. C’est à trois «êtretés» que le concile de Constantinople (381) attribue subtilement les rôles de la trinité : le Père créateur ou intelligence, le Fils ou verbe rédempteur et le Saint Esprit ou amour sanctificateur. Le fils devient la face visible de l’invisible ; la Renaissance picturale, en couvrant de chair l’idée de Dieu, a fait chuter l’absolu dans le relatif. On retrouve les trois états de la manifestation en la personne des trois rois mages, Melchior, Gaspard et Balthazar. Ils symbolisent les trois fonctions du roi du monde dans la personne du Christ naissant, roi, prêtre, prophète. À souligner l’absence du 4ème roi mage, Artaban, égaré et toujours à la recherche de l’étoile qui fait penser au 4ème pilier occulté du temple maçonnique.
  • Avec le Delta lumineux, schéma de l’être dans la multiplicité infinie de ses manifestations, on trouve le triangle portant en son centre l’œil, l’intelligence et principe conscient, les rayons exprimant l’activité, l’expansion constante de l’Être, enfin les nuages figurant le retour sur elles-mêmes des émanations expansives.
  • Dans le brahmanisme, la tri-unité se manifeste avec Brahma le créateur dont il n’existe en Inde que deux temples tant il est difficile à adorer, Vishnou le conservateur et Shiva le destructeur.
  • Les kabbalistes utilisent trois points triangulés, en remplacement du tétragramme (des 4 lettres, ils n’en retiennent que trois primordiales, la lettre hé apparaissant deux fois). Pour Reuchlin, les trois points sont à mettre en relation avec les trois plus hautes séphiroth de l’Arbre de vie, Kéther, Hochmah et Binah.
  • Le mysticisme s’arrête sur l’esprit, l’âme et le corps.
  • En alchimie on retrouve le ternaire avec le soufre, principe actif qui agit sur le mercure et le sel leur résultante.
  • En franc-maçonnerie, parmi les nombres présents dans le temple qui se donnent à voir, le nombre trois paraît le plus utilisé de tous au 1er grade, représenté par une multitude de symboles : les trois grandes lumières, le triangle du delta lumineux, les trois piliers, les pas de l’apprenti, les coups de maillet. Parfois le trois est un nombre d'énumération, parfois un ternaire.  

D’autres ternaires combinent les opposés en les synthétisant en un troisième terme réalisant l’équation 1+1=3 : soleil, lune, triangle ; Osiris, Isis, Horus ; Niveau, perpendiculaire, équerre…

 

On ne peut manquer de remarquer une ambiguïté dans l’usage du nombre trois. Tantôt trois est un processus qui permet de rendre compte de la multiplicité, trois demeure et un n’est atteint qu’en conclusion ou à la limite n’est jamais atteint. Dans d’autres cas, trois n’est qu’un processus de l’unité en action (christianisme). On pourrait dire que 3 est mineur par rapport à 1 dans le cas du monothéisme et que trois reste trois dans le cas du polythéisme puisque les dieux peuvent être plus que trois. Il n’est pas inutile d’évoquer au-delà de trois les grands nombres, soit divins, soit démoniaques (légions lucifériennes) et au plan de la sensation, la désagrégation de la conscience sous les affects répétés. L’unité de la conscience se trouve compromise par la croyance aux grands nombres dont trois et un nous protègent.

De nombreux peuples ont donné au nombre trois une importance magico-religieuse que l’on peut illustrer de quelques exemples.

Dans la religion de l’Iran ancien, on retrouve dans les textes de ses rituels -l’Avesta- des rites où le trois tient une place non négligeable. Ainsi pour se purifier de l’attouchement d’un cadavre, un homme doit creuser trois séries de trois trous que l’on remplit d’eau ou d’urine et bœuf. Il commence alors par se laver trois fois les mains puis le prêtre asperge  les parties de son corps souillées pour en chasser le mauvais esprit.

Le nombre trois se retrouve dans le tirage au sort au moyen de flèches divinatoires. L’intérêt de ce rite réside dans le fait qu’il recouvre une grande aire géographique de l’Iran jusqu’aux bédouins arabes. Hésitant devant une décision à prendre, l’homme choisit trois flèches, inscrivant sur l’une « mon seigneur m’ordonne », sur une autre « mon seigneur m’interdit » et rien sur la troisième. Il replace les flèches dans son carquois, en tire une au hasard, tire au sort, et suit les conseils prescrits.

Une coutume légendaire rapporte que lorsqu’un roi mourrait sans descendance, il fallait laisser s’envoler un aigle, et l’homme sur la tête duquel l’oiseau se poserait trois fois serait choisi comme souverain.

Le nombre trois donne donc à l’acte divinatoire un sens de participation au monde invisible supra-conscient qui décide d’un évènement de façon étrangère à la logique humaine, trois actes successifs en conditionnant l’accomplissement.

 

On trouve également dans notre domaine culturel une foule d’actes dont nous ne pouvons indiquer la raison, même s’ils sont accomplis personnellement par jeu ou avec un certain sérieux. Dans tous les cas, il y a une relation logique entre l’acte et son but apparent. Tylor a donné à ce genre de phénomène le nom de « survivals » qui s’apparente à la superstition. On frappe trois fois sur le bois pour dire « pourvu que cela dure », on lève trois doigts en l’air pour prêter serment, le pompier frappe trois coups avant la levée du rideau, les scouts lèvent trois doigts pour saluer.

 

Dans le domaine moral et chrétien, le ternaire revêt également une importance particulière. Les forces qui détruisent la foi de l’homme sont le mensonge, l’impudence et le sarcasme. Sont également trois les forces qui mènent l’homme vers « l’enfer », la calomnie, l’endurcissement et la haine. Enfer que Jean-Paul Sartre décrit dans Huit-clos comme étant la condamnation de trois êtres à vivre ensemble et toujours à travers une relation du type A privilégie B, B privilégie C et C ignore B. La triangulation des personnages au théâtre, et dans la vie, est presque toujours source de drame.

 

La perception du monde se fait à travers le ternaire : pensées, émotion, sensations. Chacune de ces fonctions psychiques est un instrument de connaissance. La plus complète que l’on puisse avoir d’un sujet ne peut être obtenue que si ce ternaire est actif simultanément.

 

C’est avec la figure du triangle que les francs-maçons illustrent le mieux leur attachement au nombre trois.

Les trois points disposés en triangle équilatéral, ou triponctuation, dont un sommet est dirigé vers le haut, sont souvent employés pour abréger les mots spécifiquement francs-maçons, ce qui a valu aux maçons d’être appelés «frères trois points». En même temps qu’elle devenait l’un des éléments de la signature, cette abréviation s’est fixée en forme triangulaire, sans doute pour des raisons d’ordre symbolique. Probablement issue du delta lumineux, cette figure a été introduite dans les imprimés à partir de 1775.

Le triangle est une ligne brisée à trois côtés. Avec le cercle, c’est la forme géométrique la plus simple pour délimiter un espace intérieur et un espace extérieur. Il est l’insertion de l’initiation dans le monde profane. Il est le rapport de sa signification symbolique du ternaire avec tout ce qui est à l’extérieur, notamment le vieil homme qu’il faut abandonner.

Dans un triangle, on peut toujours trouver un point en relation avec les deux autres qui donne la solution à une affirmation confrontée à une négation.

Par rapport à tout triangle, le triangle équilatéral, aux trois côtés et trois angles égaux, réalise l’égalité, il est la perfection, il est le divin tandis que le triangle isocèle (deux côtés seulement égaux) est l’humain. Le triangle équilatéral entier signifie éternité, les trois sommets désignent la passé, le présent et le futur, ses trois angles sont la sagesse, la force et la beauté mais également naissance, vie et mort. Le ternaire cosmique, temps, ténèbres lumière se réalise dans le triangle maçonnique. Sa base est la durée, le temps ; les côtés qui se rejoignent au sommet ténèbres et lumière. Sens de la création, ce triangle est aussi celui de l’initiation. Pour la franc-maçonnerie latine, il évoque « liberté, égalité, fraternité ». En 1877, le pasteur Frederic Desmons propose la formulation suivante qui va être adoptée « La Franc-maçonnerie est une institution essentiellement philanthropique, philosophique et progressive, elle a pour objet la recherche de la vérité, l’étude la morale universelle, des sciences et des arts et l’exercice de la bienfaisance. Elle a pour principe la liberté absolue de conscience et la solidarité humaine. Elle n’exclue personne pour ses croyances. Elle a pour devise Liberté, Égalité, Fraternité » ; cette liberté qui garde les francs-maçons des préjugés parce qu’elle procède de l’esprit, cette égalité qu’ils affirment dans leurs attitudes parce qu’elle contient tout le respect de la nature humaine, cette fraternité qui restitue le sens de l’humanité.

 

La loi du ternaire se retrouve dans les bijoux distinctifs des trois premiers officiers d’une loge (le vénérable et les deux surveillants) à savoir l’équerre, le fil à plomb et le niveau sur lesquels on peut s’attarder.

  • Du latin perpendiculum, ce qui pend à la verticale et perpendere, peser attentivement, apprécier avec exactitude, évaluer avec précision, la perpendiculaire est aussi appelée fil à plomb en maçonnerie.

Indiquant la verticale, la perpendiculaire est à rapprocher de la colonne caractérisée par sa hauteur. Elle invite dans un mouvement descendant à l’introspection tourné vers le passé, complétant la visite du cabinet de réflexion ; la matière domine l'esprit. Sa remontée est une libération des contraintes antérieures et prépare au futur avec l’ascension, le dépassement, l’élargissement, la montée vers l’au-delà et tout ce qui exprime l’élan invincible et toujours recommencé vers l’inaccessible, avec l’amour ardent qui promeut la vie ; la matière s'équilibre avec l'esprit.

Le second surveillant qui a une fonction d'éveilleur des apprentis porte en sautoir la perpendiculaire, symbole actif de la recherche sur soi, de la profondeur de la connaissance et de sa rectitude. Il invite l’apprenti à descendre dans les tréfonds de la conscience de soi, mesurant la pesanteur de ses pensées, de ses actes et de ses propos, puis à s'élever, libéré, régénéré, apaisé et confiant, ayant accédé à un niveau de conscience nouveau.

Partie complémentaire de l’horizontalité dans l’équerre, la verticalité doit être marquée dans toute gestuelle maçonnique qui veut faire référence à la rectitude, à la droiture et à l’équilibre.

La perpendiculaire c’est la décomposition du nom d’A-dam en aleph aspiration vers l’infini et dameth, la terre, entre lesquels l’homme essaie de résoudre ses contradictions. Actif par nature, la perpendiculaire est le symbole de la profondeur, de la connaissance de soi, de la rectitude telle que l’officier chargé de l’instruction doit la rapporter à l’apprenti. Le fil à plomb est la voie de l’élévation spirituelle.

  • Le niveau du premier surveillant se présente sous la forme d’un  châssis triangulaire auquel est suspendu un fil à plomb qui vient battre une marque quand l’instrument est en position horizontale. Il est la seconde polarité par rapport à la verticalité, donc passif.

Ce mot provient de l’ancien français nivel, déformation de livel, du latin libella, qui désigne précisément le niveau maçonnique. L’outil, composé de deux jambages et d’une traverse graduée, est surmonté d’un fil à plomb oscillant ; stabilisé à la verticale, à équidistance de son piétement, il nous indique la rectitude de l’horizontale. L’archipendule est l’ancêtre du niveau, constitué d’un cadre et d’un fil à plomb.

Le niveau est l’outil de base sans lequel aucune construction ne saurait être bâtie sans risque de s’effondrer.

Le niveau dit «de maçon» est un outil de la maçonnerie opérative. Il sert à mesurer l’horizontalité d’une surface, bien qu’il indique aussi la verticalité, s’entendant alors comme la droiture d’esprit. Il existe plusieurs types d’outils nommés  niveau, servant à vérifier la planéité : niveau à bulle, de charpentier, de paveur… Celui de la Franc-maçonnerie est un bijou, emblème de l’un des deux surveillants, variant selon les rites, avec la perpendiculaire. Ils s'appuient l'un et l'autre sur le fil à plomb. Ainsi ils permettent de vérifier la conformité de la réalisation, de l'élévation aux principes énoncés par le plan de l'œuvre, porteurs de signifiants philosophiques et de devoirs de fonction.

Pour le Chinois, le niveau est le symbole des magistrats, des hommes de justice, des justes, de ceux qui sont équitables... des hommes de droiture, ceux dont on dit parfois, en accolant le pouce et l'index et en traçant une droite dans le vide, qu'ils sont à niveau. On retrouve cette idée d’équité chez les Hébreux avec Isaïe 28.17 «Je prendrai le droit pour règle et la justice pour niveau».

Le niveau symbolise l'égalité fondamentale des hommes. Le règne de ce principe d'égalité, dans les droits et dans la valeur humaine, est la condition sine qua non de l'épanouissement de cet esprit de fraternité qui distingue la Franc-maçonnerie. Le niveau ne décrit pas l’homme, ce serait un leurre que de considérer l’égalité comme nature, il est son modèle d’action, signifiant que par son comportement l’homme institue l’égalité en se montrant équitable dans ses relations avec les autres ; c’est l’attitude seule qui donne un sens à l’égalité. Parce qu’il évoque avant tout l’égalité, le niveau convie les francs-maçons à inventer les relations qui permettront de manifester l’idéal humaniste et fraternel.

Commencé dans la verticalité avec le fil à plomb, l'apprentissage se poursuit dans le plan transversal avec le niveau. En passant de la perpendiculaire au niveau, le jeune maçon quitte le deux du dualisme, celui des oppositions, pour découvrir le deux de la multiplication, celui de la dualité.

Ce bijou, intégrant à la fois l’horizontale et la verticale, comme l’équerre, indique que seul le premier surveillant est qualifié pour remplacer le vénérable.

Au cadran solaire, le niveau se déduit de la verticale par un déplacement de l’ombre de la lumière.

  • L’équerre est portée en bijou par le vénérable. L’origine étymologique du mot vient du baslatin exquadrare, dessiner des angles droits, rendre carré, équarrir. En latin classique, l’équerre se disait norma, d’où le mot français norme. Outil d'origine compagnonnique, l’équerre, croisée avec le compas, forme le plus connu des symboles maçonniques. Dans la Francmaçonnerie spéculative, le symbole de l’équerre est attesté dès 1725.

Elle est l’union de l’actif et du passif dans la dynamique manifestée par ses branches. Ragon dit : l’équerre suspendue au cordon du vénérable signifie que la volonté d’un chef de loge ne peut avoir qu’un sens, celui des statuts de l’Ordre et qu’elle ne doit agir que d’une seule manière, celle du bien. L’équerre est considérée comme étant l’emblème de la perfection des travaux d’une loge dont le Vénérable Maître doit diriger toutes les orientations. Elle indique au maçon que s’il remplit avec exactitude tous ses devoirs, il pourra espérer parvenir à la vraie lumière.

Au niveau de la gestuelle, le signe, après la mise à l’ordre, rappelle au frère ou à la sœur l’obligation de respecter son serment lors de son initiation, il invite à la droiture. Par ailleurs, mettant les pieds en équerre, un frère (ou une sœur) doit toujours avoir en vue l’équité, la justice, la fidélité et l’irréprochabilité dans ses mœurs. Se mettre à l’ordre est l’incarnation même de l’équerre. En effet le maçon se tient droit, il est en équerre par rapport au sol, ses pieds sont en équerre et son pouce forme une équerre par rapport aux autres doigts de la main. L’équerre apparaît dans les signes d’ordre qui doivent tracer l’horizontale puis la verticale, marquant ainsi l’union des complémentaires. Elle représente l’action de l’homme sur la matière comme sur lui-même ; elle est reconnue comme symbole de bonnes mœurs.

Le maniement de l’équerre permet d’approfondir les concepts de droiture, d’équité et d’équilibre. L’utilisation mentale de l’équerre permet de donner aux mots leur sens propre afin qu’ils expriment des idées précises suivant des raisonnements droits. Grâce à l’équerre, le travail des maçons, pierre qu’il est, pourra lui faire bénéficier d’une juxtaposition parfaite sans laquelle la construction du temple serait impossible pour un vivre ensemble harmonieux. C’est parce que son rôle est de former de parfaits maçons que le vénérable maître porte l’équerre, outil indispensable pour transformer la pierre brute en pierre cubique.

 

Tel Ulysse pénétrant à l’intérieur de « Trois », le franc-maçon sera victorieux des épreuves qu’il a subies que s’il comprend que dans le temple tous les symboles de la dualité[1], et ceux du ternaire, montrent, à l’évidence, une vision de la complémentarité des contraires et de leur coïncidence dans l’unité. À lui d’être capable de porter ce message hors du temple.

 

 

[1]  extrait du Dictionnaire vagabond de la pensée maçonnique

Dualisme

Vision de l’antagonisme des contraires. Le dualisme envisage uniquement la séparation que la conscience humaine a tracée entre le monde et le moi ; ces deux termes opposés, il les appelle «esprit et matière», «sujet et objet», ou «pensée et phénomène».

 La Franc-maçonnerie semble avoir admis l’influence gnostique qui affirme, au plan exotérique, que le bien s’oppose au mal, reprenant la séparation tirée à l’excès par Zoroastre, le mazdéisme, le manichéisme, où tout ce qui n’est pas le bien est négatif ; le Diable, du latin  diabolus, du grec Διάβολος signifiant «diviser» ou «séparer», est l'esprit du mal. La même idée est exprimée différemment dès l’aube de la Franc-maçonnerie française. Dès 1749, en effet, Le Nouveau Catéchisme  de Travenol dit, à la question que venez-vous faire en Franc-maçonnerie : «on y creuse des cachots pour le vice et on y élève des temples à la vertu». Aujourd’hui encore on entend ce genre de réponses dans les rituels.

Le dualisme sépare par un cloisonnement moral qui, trop souvent, est enseigné dans le catéchisme de formation des jeunes, leur laissant croire que le franc-maçon serait, évidemment, du côté exclusif du positif, du bien, de la pureté, de la lumière, saint parmi les saints. Cette démarche  est à l’opposé de la quête initiatique et fraternelle qui rassemble ce qui est épars.

  • Dualité ; Monisme

Dualité

Vision de la complémentarité des contraires et de leur coïncidence dans l’unité. La coincidentia oppositorum est l’une des manières les plus archaïques par lesquelles fut exprimé le paradoxe de la réalité divine. Le présocratique Héraclite reconnaissait «la lutte nécessaire des contraires, harmonieux dans leur opposition même, définissant l'identité de ces mêmes contraires.»

C’est l’enseignement majeur de la symbolique de tout le décor de la loge, fondement de la formation de l’apprenti. Elle est manifestée dans le ternaire qui est constitué par un principe premier (au moins au sens relatif) dont dérivent deux termes opposés ou plutôt complémentaires (non duels mais duals). Car là même où l'opposition est dans les apparences et a sa raison d'être à un certain niveau ou dans un certain domaine, le complémentaire répond toujours à un point de vue plus profond, donc plus conforme à la nature réelle de ce dont il s'agit. C’est ce que dit le Zohar, le livre de la Splendeur de la Kabbale : «Trois sortent d’Un. Un est dans Trois. Un est au milieu de Deux et Deux embrasse celui du milieu et celui du milieu embrasse le monde.»

C’est avec la dualité que le monde devient sensible ; elle est la limite de l’infini, là où disparaît le Un.

Les kabbalistes appellent Zivoug l’accouplement du masculin Beauté, (Tiferet), et du féminin Royaume (Malkhout) qui permet le retour à l'unité.

  • Androgynie, Colonne ; Deux ; Dieu ; Dualisme ; Kabbale ; Pavé mosaïque ; Triangle ; Trois.

 

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